Un mois, une plante : l'aspérule odorante
L’aspérule odorante de son nom latin Galium odoratum (L.) Scop. est une jolie petite plante utilisée en cuisine notamment pour aromatiser les crèmes brulées et dans la fabrication du vin de mai mais elle a également des propriétés médicinales intéressantes.
Elle appartient à la famille des Rubiacées, une famille très riche au niveau mondial et qui en plus des gaillets comprend un représentant aussi connu que le caféier. En Suisse, cette famille est assez facile à reconnaitre en raison de ses feuilles verticillées[i] [1].
Attention à cueillir uniquement des plantes dont vous êtes certain·e·s de l’identification (cf. article sur les règles de cueillette).
La reconnaître :
L’aspérule odorante est une petite plante vivace de 10 à 30 cm qui vit en colonie dans les sous-bois des hêtraies et qui est très odorante (image a). La tige est quadrangulaire non ramifiée et poilue sous les verticilles des feuilles médianes (image b). Les feuilles ont une seule nervure, elles sont verticillées par 6-8 et les supérieures mesurent au moins 6 mm de large. Leur forme est oblongue-lancéolée mucronée[ii] et elles sont scabres[iii] au bord et sur la nervure médiane (image c). Les fleurs, de 4-6 mm de diamètre, sont regroupées en corymbe et chaque fleur forme un entonnoir composé de 4 pétales blanc pur disposés en croix (image d). Les fruits ont des diakènes hérissés de soies[iv] crochues (image e). Ses racines sont fines, rougeâtres, ramifiées. Avec les rhizomes, elles tracent un réseau régulier à faible profondeur dans l’humus [3, 5 et 7].
Écologie :
C’est une plante indigène non menacée, qui pousse en forêt surtout dans les hêtraies. Elle est même dominante des hêtraies mésophiles de basse altitude et de l’étage montagnard inférieur et y influence la physionomie de la végétation. Son amplitude altitudinale correspond aux forêts de feuillus, soit de la plaine (étage collinéen) jusqu’à l'étage montagnard [4 et 7].
Confusions :
L’aspérule odorante peut être confondue avec les autres gaillets à fleurs blanches, mais elle se distingue par son odeur caractéristique (plus marquée au séchage), ses feuilles supérieures verticillées par 6 à 8 et plus larges que la majorité des gaillets. Aucun gaillet n’est toxique, la confusion n’est donc pas dangereuse [2, 5 et 7].
Exemples de gaillets communs pouvant être confondus avec l’aspérule odorante
- Le gaillet gratteron (Galium aparine L.) de la famille des Rubiacées
- Le gaillet commun (Galium mollugo L.) de la famille des Rubiacées
Le gaillet gratteron est une plante comestible. Il s’agit d’une plante annuelle couchée ou grimpante de 20 à 150 cm de haut et dont les feuilles sont agrippantes en raison de soies crochues. Ses feuilles sont verticillées par 6-8 avec un petit mucron de 0,6-1,2 mm. Ses fleurs sont blanches, disposées par 1-7, en cymes axillaires pédonculées, dépassant les feuilles. Ses fruits de 3-5 mm sont hérissés de soies crochues. C’est une plante rudérale[v] qui affectionne les haies, les champs ou les zones de décombres [2 et 7].
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Le gaillet commun est également comestible. Il s’agit d’une plante vivace glabre ou à poils épars, de 30 à 150 cm de haut. Sa tige est couchée à ascendante, rameuse, quadrangulaire et souvent renflée aux noeuds. Ses fleurs, de 2-5 mm, sont blanches, planes et à lobes apiculés[vi]. Ses fruits sont plus ou moins lisses. C’est une plante des prairies, buissons, forêts claires et chemins [2 et 7].
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Précautions de cueillette :
Attention, la cueillette de l’aspérule doit être faite avec soin et vigilance, car son système racinaire est fragile, veillez donc à ne pas l’arracher mais à la couper nettement en laissant au minimum deux étages de feuilles pour que la plante reprenne [3].
Usages culinaires :
Attention la cueillette et l’utilisation de plantes sauvages n’est pas un acte anodin et nécessite de connaitre les précautions d’usage. Pour tout cela, veuillez vous référer à notre article sur le sujet ou vous inscrire à l’une de nos sorties sur l’onglet calendrier de ce site.
Relativement inodore à l’état frais, elle acquiert une odeur suave au séchage. Ses sommités fleuries ont été utilisées pour aromatiser les boissons froides dont le vin de mai. L’infusion de plantes sèches dans du lait parfume les crèmes brûlées ou autres desserts [2 et 8].
Vin de mai :
Laisser macérer 60 g de plante sèche et 30 g de sucre dans un litre de vin blanc pendant 15 jours. Ce vin est réputé contre les troubles hépatiques et cardiaques et pour redonner la joie de vivre. Il se garde au frais pendant 3 ou 4 ans [3 et 8]. |
Usages médicinaux :
Attention l’utilisation de plantes pour des usages médicinaux n’est pas anodin et ne remplace en aucun cas l’avis d’un professionnel de la santé.
L’infusion de ses sommités fleuries est antispasmodique et sédative. Elle aide lors des insomnies des enfants, de troubles nerveux, de palpitations, de vertiges et de spasmes gastriques. Elle stimule les fonctions hépatiques et traite les dyspepsies. Elle est diurétique et à faible dose, diminue les bouffées de chaleur. En externe, la plante fraîche est vulnéraire et adoucissante. Son infusion avec les fleurs de bleuet et les feuilles de plantain donne un bon collyre contre les conjonctivites [8].
Constituants :
L’aspérule odorante contient des hétérosides de la coumarine, de l’acide aspertannique, un iridoïde (aspéruloside), des anthraquinones, des tanins et de la vitamine C [8].
Contre-indications :
Comme l’aspérule odorante contient un hétéroside de la coumarine, à forte dose, elle peut potentialiser l’effet des anticoagulants. De plus si elle devient noire en séchant, elle est toxique car elle produit des dicoumarols qui constituent la mort au rat [8].
Vous souhaitez en apprendre plus sur l’identification, la cueillette ou la préparation de l’aspérule odorante et de bien d’autres plantes sauvage, alors n’hésitez pas à vous inscrire à nos sorties et ateliers.
Sources :
[1] Fragnière Y., Ruch N., Kozlowski E., Kozlowski G. (2020), Connaissances botaniques de base en un coup d'œil - 40 familles de plantes d'Europe centrale, 2e édition, Haupt, Berne, 319 pages.
[2] Couplan F., Styler E. (1994), Guide des plantes sauvages comestibles et toxiques, Delachaux et Niestlé, Lausanne, 415 pages.
[3] Thévelin T. (2012-2015), Les plantes sauvages. Connaitre, cueillir et utiliser, Lucien Souny, 339 pages.
[4] Delarze R. & Gonseth Y, Eggenberg S & Vust M. (2015), Guide des milieux naturels de Suisse, 3e édition, Rossolis, Bussigny, 440 pages.
[5] Tison J.-M.& De Foucault B. (2014), Flora Gallica - Flore de France, 1re édition, Biotope, Mèze, 1196 pages.
[6] Eggenberg S. Fragnière Y., Sciboz J., Kozlowski G. (2021), Le glossaire illustré pour la botanique de terrain, Haupt, Berne, 173 pages.
[7] www.infoflora.ch
[8] Support de cours de Ecole de plantes médicinale L’Alchémille
Lexique :
[i] Verticillé : qualifie un groupe d’organes disposés circulairement au même niveau autour d’un axe [6]. [ii] Mucroné : muni d’une pointe courte, plus ou moins raide, située à l’extrémité d’un organe [6]. [iii] Scabre : qualifie un organe rude au toucher, présentant généralement des fines aspérités, aigües et plus ou moins recourbées, le rendant presque coupant lorsqu’on glisse le doigt dessus [6]. [iv] Soie : poil long, relativement épais et raide [6]. [v] Rudérale : qualifie une plante qui se développe dans une zone modifiée par l’activité humaine mais qualifie aussi une stratégie écologique marquée par la tolérance aux perturbations environnementales [6]. [vi] Apiculé : brusquement rétréci en une pointe courte et plutôt molle [6]. |