Un mois, une plante : le tussilage
Il appartient à la famille des Astéracées (un article sera publié prochainement sur cette famille). Il s’agit de la première famille en nombre d’espèces dans nos régions et deuxième au niveau mondial, avec des représentants aussi connus que les pissenlits, les laitues ou le tournesol [1].
Le reconnaître :
Le tussilage est une plante vivace[i] de 5 à 15 cm de haut qui continue sa croissance après sa floraison, pouvant ainsi atteindre 30 cm lors de sa fructification. Il possède un pédoncule[ii] dressé unique, pourvu d’écailles charnues, portant un seul capitule[iii]. Le capitule est composé de fleurs tubuleuses et ligulées jaunes or fleurissant entre février et avril (image A). Ses feuilles basales de taille variable, apparaissent après la floraison. Elles sont coriaces et d’aspect gras, ont une forme suborbiculaire en cœur et un long pétiole[iv] sillonné pouvant dépasser 20 cm de long et ayant l’odeur de poivre. Les feuilles sont d’abord gris-tomenteuses sur leurs deux faces, puis deviennent glabrescentes dessus avec l’âge (images B et C). La marge des feuilles est irrégulièrement dentée, avec de petites dents à pointes foncées (image D). L’échancrure des feuilles est étroite et la plus grosse nervure latérale touche presque le bord de l’échancrure mais ne le longe pas. La section du pétiole à des vaisseaux principaux en forme de U (image E). Ses graines sont des akènes[v] de 3 à 5 mm avec une aigrette[vi] à soies blanches d’environ 10 cm (image F). Ses parties souterraines sont constituées d’un rhizome[vii] épais, ramifié et aromatique [2, 5, 6 et 7].
Confusions :
Pas de confusion possible lors de la floraison, car il n’y a pas de feuille, mais plusieurs confusions au stade végétatif. Ses feuilles peuvent être confondues avec celles des adénostyles (Adenostyles sp.) et des pétasites (Petasites sp.) [2 et 6]. La confusion ne serait pas grave car aucune des espèces n’est toxique, mais elles sont moins bonnes au goût et doivent être consommées avec modération car les pétasites contiendraient des composés cancérigènes. Néanmoins, je vous conseille de cueillir la plante lorsqu’elle est en fleur le temps de vous familiariser avec lui (cf. article sur les règles de cueillettes).
Les pétasites ont des inflorescences en panicules[viii] contractés de capitules blancs à rosés parfois visibles dès fin février jusqu’en mai. Elles ont de longs rhizomes traçants et des feuilles ovales à cordiformes inégalement et doublement dentées. Dans la section du pétiole, les vaisseaux principaux sont dispersés et ne forment pas un U.
Les adénostyles ont des panicules colymbiformes[ix] de capitules roses à floraison estivale apparaissant après les feuilles. Ils ont de grandes feuilles cordiformes irrégulièrement et simplement dentées. A la différence de celles des pétasites et du tussilage, ils ne présentent pas de feuilles caulinaires écailleuses. Ils sont en touffes peu imposantes, mais solidement ancrées par un pivot allongé muni de nombreuses racines secondaires [2, 5 et 6]. |
Écologie :
C’est une plante indigène non menacée, qui pousse dans les sols remués comme le long des chemins, dans les décombres ou encore les éboulis. Elle a une amplitude altitudinale très large puisqu’on la trouve de la plaine (étage collinéen) jusqu’à l’étage subalpin, voir même parfois jusqu’en dessus de la limite de la forêt (étage alpin) [6]. Selon Gérard Ducerf, le tussilage indique une instabilité des sols riches en bases et en argiles, notamment les sols mouvants et la présence de poches d’eau [4].
Attention, la cueillette et l’utilisation de plantes sauvages n’est pas un acte anodin et nécessite de connaitre les précautions d’usage. Pour tout cela, veuillez-vous référer à notre article sur le sujet ou vous inscrire à l’une de nos sorties sur l’onglet calendrier de ce site.
Constituants :
Le tussilage contient des mucilages, de l’inuline, des principes amers, des flavonoïdes, des tanins, une résine, une essence, du potassium, du zinc et de la vitamine C. Mais il contient aussi des alcaloïdes pyrrolizidiniques qui, en cas de non-respect de la posologie, peuvent avoir une action hépatotoxique (cf. contre-indications) [2 et 8].
Usages culinaires :
Les capitules ont une saveur aromatique agréable et un pédoncule juteux pouvant être dégustés tel quel, ajoutés aux salades ou cuits à la vapeur, à l’eau ou sautés à la poêle.
Les très jeunes feuilles peuvent être mangées crues avec leur pétiole qui est juteux, légèrement sucré et aromatique. Les feuilles plus âgées sont moins intéressantes car elles deviennent vite caoutchouteuses [2]. Les feuilles plus âgées sont également plus concentrées en alcaloïdes pyrrolizidiniques, je vous déconseille donc de les utiliser.
Attention au choix du lieu de cueillette et à ne pas en consomme en grandes quantités ou trop régulièrement en raison de la présence d’alcaloïdes pyrrolizidiniques, qui peuvent nuire à la fonction hépatique (cf. contre-indications).
Usages médicinaux :
Attention l’utilisation de plantes pour des usages médicinaux n’est pas anodin et ne remplace en aucun cas l’avis d’un professionnel de la santé.
En usage interne, on utilise l’infusion des fleurs ou des feuilles contre les affections des voies respiratoires car elles fluidifient les sécrétions bronchiques, facilitent leur expectoration et exercent une action antispasmodique, bénéfique en cas de toux sèche ou de crise d’asthme. Le tussilage aurait aussi des propriétés dépuratives.
En usage externe, l’infusion peut être utilisée pour réaliser des compresses qui sont indiquées pour leurs propriétés anti-inflammatoires sur les plaies superficielles ou les furoncles [8].
Vous souhaitez en apprendre plus sur l’identification, la cueillette ou la préparation du tussilage et de bien d’autres plantes sauvages, alors n’hésitez pas à vous inscrire à nos sorties et ateliers.
Sources :
[1] Fragnière Y., Ruch N., Kozlowski E., Kozlowski G. (2020), Connaissances botaniques de base en un coup d'œil - 40 familles de plantes d'Europe centrale, 2ème édition, Haupt, Berne, 319 pages.
[2] Couplan F., Styler E. (1994), Guide des plantes sauvages comestibles et toxiques, Delachaux et Niestlé, Lausanne, 415 pages.
[3] Thévelin T. (2012-2015), Les plantes sauvages. Connaitre, cueillir et utiliser, Lucien Souny, 339 pages.
[4] Ducerf G. (2014), L’encyclopédie des plantes bioindicatrices – alimentaires et médicinales – guide de diagnostic des sols – volume 1, 4e édition, Promonature,351 pages
[5] Eggenberger S., Möhl A. (2007), Flora Vegetativa, 1ère édition, Rossolis, Bussigny, 680 pages.
[6] www.infoflora.ch
[7] www.openflora.ch
[8] Support de cours de Ecole de plantes médicinale L’Alchémille
Lexique :
[i] Vivace : se dit d’une plante qui vit plusieurs années, c’est-à-dire qu’entre la germination de la graine et la mort de la plante, plus de deux ans s’écoulent. Synonyme : pérenne. [ii] Pédoncule : axe robuste portant une inflorescence ou une fleur unique. [iii] Capitule : inflorescence constituée de nombreuses petites fleurs très serrées, situées côte à côte et portées par de très courts pédoncules insérés sur un vaste réceptacle commun. Le capitule forme une tête ayant souvent l’aspect d’une fleur unique. [iv] Pétiole : partie rétrécie de la feuille qui la rattache à la tige, on l’oppose à sa partie plus élargie, le limbe. [v] Akène : fruit sec qui ne s’ouvre pas à maturité. [vi] Aigrette : faisceau de poils ou de soies que portent les fruits (ou les graines) de certaines plantes et qui facilite leur dispersion par le vent. Synonyme : pappus. [vii] Rhizome : tige souterraine horizontale généralement épaissie et garnie de racines. [viii] Panicule : inflorescence de type grappe composée dont la longueur des pédicelles diminue de la base vers le sommet, lui donnant généralement une forme conique ou pyramidale. [ix] Colymbiforme : en forme de corymbe, qui est une inflorescence de type grappe aux pédicelles dressé atteignant tous environ la même hauteur et évoquant une ombelle (forme de parapluie). |