Un mois, une plante : la mauve
La mauve sylvestre de son nom latin Malva sylvestris L. est une plante des friches qui a souvent été considérée comme une « mauvaise herbe » mais qui en plus de sa beauté possède de multiples usages culinaires ou médicinaux.
Elle appartient à la famille des Malvacées, une famille avec 4'220 espèces au niveau mondial et qui a été fortement remaniée et augmentée à la suite des avancées de la biologie moléculaire qui comprend notamment les tilleuls, les mauves ou la rose trémière [5].
Attention à cueillir uniquement des plantes dont vous êtes certain·e·s de l’identification (cf. article sur les règles de cueillette).
La reconnaître :
La mauve est plante annuelle, bisannuelle ou vivace, à croissance rapide et de 30 à 120 cm de haut. Sa tige à section ronde est généralement dressée ou ascendante et pubescente et parfois légèrement ligneuse[i] à la base (image a). Les feuilles sont simples, alternes, à marge souvent crénelée à dentée. Le pétiole[ii], plus long que le limbe[iii] foliaire, est muni de stipules[iv] caduques[v] (image e). Les inférieures sont suborbiculaires[vi], +/- découpées et les supérieures ont généralement à 3 à 7 lobes +/- profonds (palmatilobés[vii] à palmatipartites[viii]), aigus ou arrondis et irrégulièrement dentés (image b et c). Les fleurs sont groupées par 2 à 6, en cyme[ix], à l'aisselle des feuilles et portées par des pédicelles[x] plus courts que la feuille (image d). Les fleurs ont un double calice, car il est complété par un calicule[xi] à 3 lobes ovales à divisions 3 à 6 fois plus longues que larges (image f). Les pétales, à préfloraison tordue, sont grands, de 2 à 3 cm de long, libres, rose-violacés veinés de trois stries pourpres, échancrés et 3 à 4 fois plus longs que le calice[xii]. Les étamines sont soudées entre elles autour du style, formant un tube staminal caractéristique de la famille (image g). Les carpelles[xiii] sont ridés et +/- glabres et disposés en cercle. Le fruit, de 8 à 10 mm de diamètre, est un polyakène[xiv] constitué d’akènes circulaires appelés traditionnellement “fromageons » et dont le pédicelle[xv] fructifère est étalé (image h). La racine est blanchâtre, épaisse, un peu fibreuse et sa partie principale est très développée et profondément enfoncée dans le sol [7 et 9].
Écologie :
C’est une plante indigène non menacée, elle est thermophile et pousse le long des chemins et dans les décombres. C’est aussi une plante thermophile[xvi] souvent présente dans les milieux constitués de rudérales annuelles [6]. Elle pousse plutôt à basse altitude de la plaine (étage collinéen) jusqu’à l’étage montagnard [7]. Selon Gérard Ducerf, elle indiquerait un engorgement ou un compactage des sols riches en base, en matière organique, en azote et en potasse provoquant des anaérobioses [3].
Confusions :
Principalement avec les autres mauves ou la rose trémière, ce qui n’est pas grave car toutes les mauves ont le même usage.
Avant l’apparition des feuilles la mauve sylvestre peut être confondue avec le lierre terrestre (Glechoma hederacea L) qui a une forte odeur, l’alliaire (Alliaria petiolata (M. Bieb.) Cavara & Grande) qui a une odeur d’ail ou les violettes (Viola odorata L.), à nouveau ces confusions ne sont pas graves car toutes ces plantes sont comestibles.
Exemple de mauve et rose trémière pouvant être confondues avec la mauve sylvestre :
- La mauve à feuilles rondes (Malva neglecta Wallr.) de la famille des Malvacées
- La rose trémière (Alcea rosea L.) de la famille des Hypericacées [9].
La mauve à feuille rondes est une plante annuelle ou monocarpique[xvii], qui se distingue de la mauve sylvestre par :
- sa tige couchée. - sa plus petite taille, soit de 10 à 40 cm de de haut. -ses feuilles supérieures à peine lobées et suborbiculaires. - ses pétales rosé, presque blancs, atteignant 5 à 15 mm de long et environ 2 fois plus longs que le calice. - ses fruits de 6 à 7 mm à carpelles lisses, disposés en cercle et au centre déprimé et dont le pédicelle fructifère est recourbé à maturité.
Source des images : flore-en-ligne.fr |
La rose trémière est une plante monocarpique recouverte de poils hérissés de 1 à 3 mètres. Les feuilles sont orbiculaires et palmatilobées, à base cordiforme, à marge crénelée et stipulée. Les inflorescences sont en longue grappe de fleurs. Les lobes du calicule à 6 à 9 divisions soudées à la base sont largement triangulaires avec des poils tomenteux et étoilés. Les pétales de 3 à 5 cm, 3 à 4 fois plus longs que le calice et généralement rose, pourpre-violet ou rouge noirâtre, rarement blanc ou jaune. Les carpelles de 7 à 8 mm sont sillonnés et ailés. C’est une plante ornementale des jardins et parfois subspontanée que l’on trouve dans les milieux rudéraux. |
Attention, la cueillette et l’utilisation de plantes sauvages n’est pas anodine et nécessite de connaitre les précautions d’usage. Pour tout cela, veuillez vous référer à notre article sur le sujet ou vous inscrire à l’une de nos sorties ou ateliers sur l’onglet calendrier de ce site.
Précautions de cueillette :
Les mauves poussant souvent le long des chemins ou dans les décombres, il faut veiller à les cueillir dans des lieux non pollués (cf. règles de cueillettes) et il peut être intéressant de privilégier les plantes des jardins biologiques. Les mauves sont également souvent sujettes à la rouille et il est déconseillé de cueillir les plantes contaminées [6].
Usages culinaires :
La mauve est une bonne plante comestible dont toutes les parties peuvent être consommées. Les jeunes feuilles crues de la mauve sont excellentes en salade, plus âgées elles peuvent être cuites en légume ou ajoutées aux soupes comme épaississant. Les boutons floraux et les jeunes fruits peuvent être conservés au vinaigre, à l’huile avec des épices ou lactofermentés. Les fleurs décorent les salades ou peuvent être ajoutées ou infusées dans les boissons mais elles n’ont pas beaucoup de goût. Les fruits crus, débarrassés de leur calice, ont un goût de noisette et de pois, et peuvent être mangés tel quel ou ajoutés aux salades. Enfin les jeunes racines sont épaississantes et s’ajoutent aux soupes.
Usages médicinaux :
Les fleurs et les feuilles sont anti-inflammatoires digestives (et pulmonaires), adoucissantes, laxatives et anti-infectieuses.
En interne, elle est utile en cas de troubles gastriques, de diarrhées, de constipation et dans tout mélange pour les problèmes digestifs. Mais également pour lutter contre les rhumes, les bronchites et les irritations de la muqueuse buccopharyngée, utile en cas de toux sèches, de maux de gorge ou d’angines.
En externe, sous forme de compresse, de cataplasme ou dans le bain, elle est émolliente et décongestionnante très utile en cas d’affections dermatologiques très variées comme les crevasses, les écorchures, les gerçures, les abcès, les furoncles ou les piqûres d’insectes. Mais aussi en cas de douleurs de la cavité buccale ou du pharynx sous la forme de bains de bouche ou de gargarismes. Sa racine favorise la poussée des dents chez l’enfant.
Constituants :
Comme la plupart des Malvacées de nos contrées, les fleurs et les feuilles de la mauve sylvestre sont riches en mucilages (5 à 12 %) et pauvres en tanins et contiennent aussi des flavonoïdes. Les fleurs contiennent aussi 6 à 7 % d’anthocyanosides (la malvine). Dans les feuilles, on trouve également des substances minérales (manganèse, potassium, calcium, fer, magnésium et zinc) et des protéines [8 et 9].
Contre-indications :
Aucune, cependant en raison de la présence de mucilage, elle peut diminuer l’absorption de certains médicaments pris simultanément [9].
Vous souhaitez en apprendre plus sur l’identification, la cueillette ou la préparation de la mauve sylvestre et de bien d’autres plantes sauvages, alors n’hésitez pas à vous inscrire à nos sorties et ateliers.
Sources :
[1] Couplan F., (2017), Le régal végétal, Sang de la terre, Paris, 527 pages.
[2] Delarze R. & Gonseth Y, Eggenberg S & Vust M. (2015), Guide des milieux naturels de Suisse, 3e édition, Rossolis, Bussigny, 440 pages.
[3] Ducerf G. (2014), L’encyclopédie des plantes bioindicatrices – alimentaires et médicinales – guide de diagnostic des sols – volume 1, 4e édition, Promonature, 351 pages.
[4] Eggenberg S. Fragnière Y., Sciboz J., Kozlowski G. (2021), Le glossaire illustré pour la botanique de terrain, Haupt, Berne, 173 pages.
[5] Spichiger R.-E., Figeat M., Jeanmonod D. (2016), Botanique systématique avec une introduction aux grand groupes de champignons, 4e édition, PPUR, Lausanne, 448 pages.
[6] Thévenin T. (2012-2015), Les plantes sauvages. Connaitre, cueillir et utiliser, Lucien Souny, 339 pages.
[7] www.infoflora.ch
[8] Support de cours de Ecole de plantes médicinale L’Alchémille
[9] Support de cours de Chemin de la Nature
[10] www.openflora.ch
Lexique :
[i] Ligneux : qualifie une plante ou un organe dont certains tissus sont rigidifiés par la lignine [3]. [ii] Pétiole : partie rétrécie de la base de la feuille qui la rattache à la tige. [iii] Limbe : Partie en général, aplatie et élargie de la feuille prolongeant le pétiole qui est le siège principal de la photosynthèse, de la respiration et de la transpiration. [iv] Stipule : appendice foliaire généralement disposé par paire, d’une part et d’autre de l’insertion de la feuille [3]. [v] Caduque : se dit d’un organe se détachant et tombant spontanément [3]. [vi] Suborbiculaire : de forme ± ronde [3]. [vii] Palmatilobé : se dit d’une feuille dont le limbe est palmé et lobé avec des divisions peu marquées [9]. [viii] Palmatipartite : se dit d’une feuille découpée, palmée dont les divisions qui donnent naissance à des lobes, vont au-delà du milieu du limbe. Les divisions sont presque séparées mais pas totalement [9]. [ix] Cyme : type d’inflorescence dont l’axe principale se termine toujours par une fleurs et arrête sa croissance [3]. [x] Pédicelle : axe de petite taille portant une fleur unique ou un épillet [3]. [xi] Calicule : calice accessoire doublant le calice à l’extérieure, formé par les stipules des sépales [3]. [xii] Calice : ensemble des sépales. [xiii] Carpelle : organe femelle de base dans la fleur des angiospermes, composé de l’ovaire qui renferme les ovules, du style et du stigmate [3]. [xiv] Polyakène : Un polyakène est un fruit multiple issu d’un gynécée formé de plusieurs carpelles libres entre eux. Il est constitué de plusieurs akènes qui sont des fruits secs, indéhiscents (ne s’ouvrant pas à maturité), à une seule graine non soudée à la paroi interne du fruit [9]. [xv] Pédicelle : axe de petite taille portant une fleur unique ou un épillet [3]. [xvi] Thermophile : se dit d’un organisme se développant de manière optimale à des températures élevées [3]. [xvii] Monocarpique : se dit d’une espèces qui meurt après sa première et unique fructification, elles peuvent être annuelles, bisannuelles ou avec une longue vie végétative [3]. |